Au coeur du futur dispositif olympique, La Plaine Commune est, en puissance, l'un des pôles nationaux de développement de la construction bois. C'est en même temps le pendant et le complément de l'expérience bois d'EPAMARNE, cette fois en première couronne. Certes, on ne peut pas comparer La Plaine à Montreuil pour l'instant, ni le territoire d'EPAMARNE d'ailleurs. Mais les perspectives à court terme sont explosives.
A la louche, jusqu'ici, ni la Plaine Commune ni la ville de St Denis ne se démarquent vraiment en matière de construction bois. On relève l'école ANatole France de Fabienne Bulle à St Denis en 2013, l'extension de l'école de la légion d'honneur dans la même localité plus récemment par Belus et Henocq. Ah oui, il y a aussi ces deux belles maisons en bois construites avec APIJ BAT pour le quartier de la petite Espagne, en première phase de remplacement de bâtisses insalubres et couvrant un foncier apétissant tout près de la station RER de la ligne B.
La Plaine Commune n' a pas connu l'impulsion de développement durable donnée à EPAMARNE par Nicolas Ferrand, mais tout de même, elle s'est dotée dès 2012 d'une Agence Locale pour l'Energie et le Climat (ALEC). Des ALEC, il en éclot partout en France depuis une dizaine d'années, celle du Grand Nancy a soufflé sa dixième bougie, il s'agit d'une sorte de structure mi CAUE, mi relais de l'ADEME, et les ALEC sont institutionnalisée depuis la loi de transition énergétique (loi du 17 août 2015) comme des organismes d'animation territoriale. L'une des particularités de la grande ALEC de La Plaine Commune est qu'elle occupe la case construction bois avec un référent, Tangi Laz, et qu'elle est active dans ce domaine, que ce soit en 2014 de concert avec Francîlbois, à l'occasion de la parution de son cahier technique sur les « Usages durables du bois en milieu urbain »,ou en animant des réunions d'information et de visites comme la troisième du genre organisée vendredi autour de la ZAC Montjoie. Entre temps, cette ALEC avait été placée sur la liste des associations que la nouvelle gouvernance de région ne voulait plus subventionner, mais le département 93 s'est engagé plus que jamais. Pour la filière bois, l'ALEC Plaine Commune et son référent construction bois font partie, au même titre que la politique volontariste d'EPAMARNE, des choses franciliennes qu'il convient absolement de soutenir à un moment où s'éclipse le CNDB. Surtout dans la perspective des enjeux des JO24 !
Les deux premières visites bois de l'ALEC, en 2016, étaient dans le coeur du sujet, avec le fameux R+5 de KLH en dent creuse et une instructive opération de rénovation en bois d'une opération pionnière réalisée dans ce matériau, comme quoi les liens entre ce territoire et la construction bois sont plus anciens que l'on pourrait le croire. ensuite, ce fut le tour de la visite de l'école d'Epinay-sur-Seine en bois et paille. Le 15 décembre, le programme géographiquement ramassé n'en était pas moins particulièrement contrasté, offrant un instantané éloquent de ce qui se passe en ce moment en matière de bois dans ces quartiers en mutation. Même si on se trouve pour ainsi dire entre deux eaux, avec quelques réalisations parfois spectaculaires achevées, et d'autres encore en attente de travaux, comme si la crise de 2015 avait laissé son empreinte.
Au nord de la ZAC Montjoie, à proximité de la station RER, on trouve donc rue Maria Leonor Rubiano les deux maisons en bois et, depuis deux ans, en prolongement jusqu'à l'angle de la rue Cristino Garcia, un ensemble de logements en bois porté par SNL et qui s'inscrit dans la même veine. Soit : un chantier de réinsertion, en concertation avec les habitants qui bénéficient d'un relogement, tout en conservant une approche écologique. L'approche défendue par SNL et l'architecte Yannick Champain vaut le détour mais il faut relever que malgré tout ce genre de chantiers ne se sont pas succédés depuis. Vincent Parreira de AAVP a signé une école Maria Casarès étonnante, juste à côté, avec son bardage bois en dentelle, mais il a reçu un mention à l'Equerre
d'argent dès 2011. Juste en face, de l'autre côté de la rue Cristino Garcia, LA Architecture, prix de la première oeuvre pour des logements collectifs en 2014, attend encore pour lancer les travaux d'une grosse opération de 42 logements qui de bois sont passés à structure maçonnée et façade bois, tandis qu'à côté se dresse une opération de logements collectifs toute maçonnée.
On se trouve exactement en bordure nord de la ZAC Montjoie, donc dans le quartier de la petite Espagne que rappellent opportunément les noms de rue et le nom de la nouvelle école. Les migrants de la région de Cacerès, longtemps des enfants vendus pour travailler à l'usine de verre, n'avaient pas forcément la fibre du bois dans leurs constructions bricolées, mais le bois affiché pour des habitations basses prend dans le contexte une connotation de rappel historique.
De l'autre côté de la rue du Landy commence la ZAC Montjoie, on est en pleine histoire de France mais il ne subsiste ni le monticule ni la croix qui marquait la limite entre St Denis et Paris, où les souverains venaient accueillir leurs hôtes, sans parler des foires du Lendit... Le regard tombe d'emblée sur l'impressionnant Lycée de la Plaine, son travail exceptionnel réalisé en façade et, quand on le sait, en prolongement à l'intérieur. Ce n'est pas du bois en structure, mais un dialogue architectural avec le bois, qui dialogue à son tour avec celui de l'école Maria Casarès. En face du lycée, un espace qui va accueillir le Curve, un grand immeuble de bureaux R+7 à venir "en ossature bois". En attendant, Tangi Laz nous offre la longue façade nord de l'Ilot E3D, ouvrage achevé où s'insère donc le Panobloc de Techniwood. La façde droite et simple donne sur un couloir qui dessert des logements étudiants. Selon Bouygues, c'est la seconde fois seulement que le Panobloc est employé en coffrage perdu selon une variante de la démarche Mix3B, et la première fois à cette échelle. L'ensemble du ce grand complexe qui combine logement, école et équipements sportifs a fait l'objet d'une analyse de cycle de vie par Amoès. L'ACV valorise le Panobloc, mais aussi les menuiseries bois (turques), le béton bas carbone (on s'en serait douté).
C'est tout, se demande-t-on quand on lit la longue liste des agences d'architecture qui interviennent sur la ZAC Montjoie, pour ne parler que d'elle ? Rappelons la façade à structure bois de l'immeuble pionnier Mediacom 3 par feu Françoise-Hélène Jourda. Car au regard de tout ce qui se construit ici, la part du bois reste somme toute modeste. La construction en bois n'est pas définie comme une priorité à la différence de ce qui se fait sur le territoire d'EPAMARNE. Comme quoi le bois, dans la construction, c'est un éternel (re)commencement.